De l’espoir

  • De l’espoir

    Publié par proteus42222 le 27 août 2016 à 19 h 44 min

    Salutations à toutes et à tous.

    Je suis un Québécois âgé de 52 ans. Je suis prof de philo, mais pendant quelques années j’ai mis mon métier entre parenthèses pour réaliser un vieux rêve: conduire des véhicules lourds. Ma santé est boiteuse, car j’ai été obèse pendant quelques années. Je suis diabétique et je fais de l’arthrose. Je pratique à présent le vélo et la natation, et j’ai perdu beaucoup de poids. Je suis musicien et plus jeune, j’ai été exposé à de la musique très, très forte. J’ai des acouphènes depuis 5 ans maintenant. Je désire prendre la peine de vous partager mon expérience, parce que c’est une histoire qui se termine bien. Aujourd’hui, je profite de chaque instant de bonheur. Je n’invite toutefois personne à m’imiter, et certaines choses que j’ai faites sont dangereuses, voire carrément nuisibles. Je ne garantis absolument pas les résultats non plus, mais je pense que si ça peut faire une différence pour quelqu’un, ça aura valu la peine que j’écrive ceci. Je ne vais pas tout raconter, mais je tâcherai d’être le plus utile possible.

    Mes acouphènes (j’en ai plusieurs) sont accompagnés d’hyperacousie. J’en ai souffert au point de paniquer à la seule idée que je puisse vivre avec ces cris durant 20, ou pire, 30 ans. L’acouphène invivable est un bruit blanc très, très aigu, entre 8000 et 11000 Hz, et son volume, dans le pire des cas, est comparable au sifflement d’un avion de chasse me faisant face, moteurs plein pot. J’ai imposé à ma famille des périodes sombres, des moments d’impatience et de colère, et des envies de me cogner la tête sur les murs.

    J’ai cherché des solutions, de plus en plus compulsivement à mesure que le temps passait. J’ai vu trois ORL qui m’ont tous laissé à moi-même. J’en suis venu à accepter de vivre une semaine à la fois, pas plus. Ma vie tenait à ce contrat hebdomadaire. La mort faisait partie des alternatives qui se présentaient à moi. Si j’avais eu de la douleur cinq fois moins intense que les acouphènes qui m’affligeaient, j’aurais bénéficié en quelques minutes d’un lit d’hôpital et des doux effets d’une solide dose de morphine. On ne sait pas, en médecine, que souffrance n’est pas toujours synonyme de douleur.

    Dans l’espoir de me sortir de ce cauchemar, j’ai noté dans un journal, pendant un an, tout ce que j’ai fait, ou les médicaments que j’ai absorbé en relation avec les acouphènes (je ne conseille pas la tenue d’un journal si ce n’est pas nécessaire). C’est ainsi que j’ai noté que la consommation modérée d’alcool, l’activité sportive et les mauvaises nuits de sommeil provoquent une aggravation de mon état.

    Mon médecin de famille, ma pharmacienne habituelle et éventuellement une audiologiste m’ont aidé à trouver des solutions sans mettre ma santé plus en danger encore, en me conseillant sur ce qu’il faut éviter et pourquoi. Pendant un certain temps, par exemple, je me soulageais en “choquant” mon audition au matin dès le lever (le plus vite possible après le réveil), avec de la musique horriblement forte, directement dans mes oreilles. Ne m’imitez pas ! C’était une solution à court terme qui me permettait de faire quelque chose de ma vie et d’accepter de me battre encore. Mais je suis conscient que ça a certainement été très dommageable.

    Mon audition est presque normale, mais des tests récents indiquent que que les cils de mon oreille interne sont très abîmés. Certaines fréquences ne répondent plus du tout.

    Parmi mes “expériences” effectuées en collaboration avec mon médecin et ma pharmacienne, j’ai pu trouver de l’apaisement avec des benzodiazépines (Xanax et Clonazépam), mais le soulagement est bref et suivi d’un effet rebond assez cruel, outre que ce sont des médicaments très addictifs. Enfin, l’usage des benzodiazépines à long terme augmente par 1,6 fois les chances d’être atteint d’Alzheimer. Je ne les suggère à personne, ça n’en vaut pas le coup.

    Par contre, le Cyclobenzaprine (Flexeril, 20 mg par jour dans mon cas) a eu un effet formidable. J’ai connu plusieurs semaines sans le moindre signe d’acouphène (quel bonheur !) et le Flexeril est très faiblement addictif. Je peux donc le cesser graduellement, puis le reprendre pour une autre période de rémission. C’est un vieux médicament, connu et bénin, habituellement prescrit comme relaxant musculaire.

    Mais ce n’est pas encore ça qui a changé ma vie.

    Ce qui a vraiment changé ma vie, c’est d’avoir compris ce qu’on doit entendre par “habituation”.

    Parce que ce que j’en ai lu sur Internet semble signifier que l’habituation, c’est la soumission, la défaite, le renoncement, la résilience, l’acceptation de son sort. Quand on en est à se demander si on va accepter de vivre une semaine de plus, ce genre de langage n’a rien d’encourageant. L’habituation, ce n’est pas ça.

    J’ai compris seul, et ça a été confirmé tardivement par mon audiologiste (qui me suit depuis peu de temps), que le sommeil est au centre de ma difficulté à supporter l’acouphène: mon cerveau ne reste pas inactif; il agit pendant que je dors, et dans la mesure où je l’occupe, pendant mon sommeil, à gérer des sons qui voisinent l’acouphène (des sons très aigus dans mon cas, donc), il risque de se passer des choses encourageantes.

    J’ai trouvé (après bien des recherches) un CD de sons pour soulager les acouphènes dont une piste en particulier fait un bruit qui évoque à la fois le bacon qui frit ou la pluie sur du béton: une sorte de crépitement qui empêche carrément mon cerveau d’émettre mon acouphène. Un bruit guère agréable en soi, mais… quel soulagement pour moi que de l’écouter ! J’ai transféré la piste sur mon smartphone, et je la fais jouer en boucle pendant la nuit, avec en parallèle des bruits d’eau et de tonnerre depuis une application. Compte tenu de mes besoins en sons très aigus, j’ai acheté des écouteurs intra-auriculaires de qualité correcte, et très petits pour le confort.

    Sensible au fait que l’utilisation de tels écouteurs peut constituer un risque, j’ai demandé conseil à mon audiologiste. Voici le truc qu’elle m’a enseigné: “Faites jouer votre son dans les écouteurs, et placez ceux-ci dans votre main fermée à un mètre de votre tête. Si vous n’entendez pas le son, alors le volume est sécuritaire.”

    Les premières nuits où j’ai dormi avec ces sons dans les oreilles ont été plutôt pénibles. Il a fallu que je m’habitue à dormir avec ce brouhaha (et ces écouteurs dans les oreilles, même tout petits) et puis, un beau matin…

    Miracle. Miracle. J’ai eu envie de faire la grâce matinée, pour la première fois depuis des années. Je savourais le chant des oiseaux, la respiration tranquille de mon épouse, le bruit du vent dans les arbres. Et pourtant, je n’entendais toujours pas le silence. Mes acouphènes étaient là. Mais il me fallait faire un effort de volonté pour les entendre.

    Comme si mon cerveau, pendant mon sommeil, avait programmé les sons aigus issus du crépitement (mais incluant mes acouphènes), comme non-pertinents, insignifiants, négligeables, neutres. L’habituation, c’est ça. L’habituation, c’est ce qui fait qu’on finit par ne plus entendre le tic-tac d’une horloge. C’est ce qui fait qu’en voiture, on n’est pas ennuyé par les bruits ambiants, des pneus et du vent. C’est ce qui fait que les membres d’une famille dont la maison est au bord d’une voie ferrée finissent par ne plus entendre les trains qui passent.

    Je jure que je ne souffre plus de mes acouphènes. A quoi pourrais-je encore comparer cette habituation ? Imaginons que vous conduisiez sur une route la nuit, et qu’une lumière aveuglante vous harcèle. Chaque kilomètre de route devient pour vous une torture, vous en avez assez de ce feu qui vous empêche de vous concentrer sur la route. L’habituation n’éteint pas le feu: il le déplace derrière vous. Il est toujours là, mais il vous est facile de l’oublier, de conduire le coeur léger en pensant à autre chose.

    Essayez cette méthode: dormez avec des sons qui se superposent (en fréquence) à votre acouphène. Assurez-vous seulement que le volume sonore n’est pas trop élevé.

    Étant donné qu’il y a tellement de sortes d’acouphènes, je ne garantis pas le résultat, mais en tout cas, votre cerveau doit aussi faire sa part pour vous aider. Si comme moi, vous êtes hyperacousique, il se peut que les premières nuits soient difficiles. C’est comme si l’acouphène “luttait” contre le son thérapeutique, comme s’il voulait l’enrober, le vaincre. Mais dans mon cas, après trois nuits, l’hyperacousie lâchait prise.

    Aujourd’hui, je ne vais nulle part sans bouchons pour les oreilles. Je ménage ce qui me reste d’audition. Je ne sais pas à quoi ressembleront les années à venir, mais je profite de l’instant présent. J’évite les milieux où l’ambiance est agressante, mais ça ne m’empoisonne plus la vie. J’ai repris les longues écoutes de musique classique dont je m’étais déshabitué.

    La semaine dernière, en faisant du vélo en campagne, je me suis arrêté pour savourer la scène: les champs de maïs au soleil, le sous-bois, et les grillons, innombrables, qui se faisaient entendre tout autour de moi. C’était magnifique. Puis j’ai eu cette réflexion: “Mais ces grillons émettent un bruit qui ressemble à mes acouphènes !” J’ai souri en admettant en mon for intérieur que je serais bien content d’être propriétaire de l’endroit, même avec ses grillons !

    wyman a répondu il y a 2 années, 5 mois 6 Membres · 7 Réponses
  • 7 Réponses
  • chris

    Membre
    3 septembre 2016 à 22 h 55 min

    `bonsoir proteus 42222
    Je me reconnais bien dans ton parcours ,j ai également des acous depuis 5ans ils sont arrivé progressivement suite à des écoutes de musique prolongé enfin je pense.
    Mais le problème c est que je n arrive pas à les gérer
    Je voudrai savoir au bout de combien de temps d écoute la nuit tu as obtenu un soulagement?
    En tout cas merci pour ton message il est réconfortant et plein d espoir
    Chris

  • proteus42222

    Membre
    4 septembre 2016 à 15 h 02 min

    Salut Chris,
    Il y a d’abord le temps qu’il m’a fallu pour trouver un son correspondant à l’acouphène. On parle ici de plusieurs semaines, puisque j’ai essayé plusieurs gadgets, et sur mon smartphone un tas d’applications. Quand j’ai découvert la piste dont je parle, ce crépitement très aigu, alors ça n’a plus été long. Je dirais quatre à cinq nuits (les deux premières nuits ayant été assez pénibles, à cause de l’hyperacousie).

    Par la suite, ça s’est très rapidement amélioré. Je te dirai même que dans les secondes qui suivent mon réveil, il m’arrive parfois de ne pas entendre du tout le crépitement, et de me dire “zut, j’ai perdu mes écouteurs en dormant” pour m’apercevoir qu’en fait ils sont bien là, que le crépitement est toujours en train de jouer, et que je dois me réveiller un peu plus pour les entendre !

    Mon audiologiste confirme cette curieuse dynamique: tout se passe comme si le cerveau, pendant le sommeil, exécutait une remise à zéro (un “reset”) qui incluerait et “effacerait” les bruits interprétés comme “non-pertinents” ou “sans signification”. Et cet effet perdure dans la journée. On peut entendre les acouphènes si on cherche, mais autrement ils ne nuisent absolument plus.

    J’ajoute en terminant que si je dormais seul dans ma chambre, je n’aurais pas besoin d’écouteurs intra-auriculaires, et que sans doute je les éviterais. Un pareil crépitement est très bien rendu par le petit haut-parleur d’un smartphone. Mais jamais je n’oserais imposer ça ma mon épouse !

  • chris

    Membre
    11 septembre 2016 à 15 h 40 min

    Merci
    D avoir répondu aussi
    rapidement, je vais tester .
    Mon acouphène ce situe au alentour de 6000 hertz qui correspond à un son très aigu . Après avoir vu une multitude de spécialistes sur Paris je fatigue .
    Mais je ne dois pas me décourager avec le temps nous devons tous trouver soit un soulagement ou une amélioration j ai 50 ans je pense quand même encore profiter de la vie.
    Je crois que je vais encore essayer certaine thérapie du style sophro mindfullness et thérapie par le son comme tu as fait
    Je te remercie encore pour ton message
    Chris

  • expertas

    Membre
    5 janvier 2017 à 11 h 47 min

    Suicide

  • triba

    Membre
    28 novembre 2017 à 19 h 11 min

    ???

  • alenema

    Membre
    28 novembre 2017 à 22 h 32 min

    Bonsoir merci pour ce message plein d’espoir qui redonne le sourire et qui montre qu’il ne faut pas baisser les bras moi aussi j’ai fait comme vous j’ai trouvé une application gratuite et je m’en sers pour pouvoir m’endormir au début je m’étais les écouteurs dans mes oreilles mais j’avais peur que cela me les endommage alors du coup j’ai mis le Smartphone juste au-dessus de ma tête pour pouvoir écouter ces bruits mais il est vrai qu’en ce moment je pense beaucoup à mon acouphènes il y a des périodes de haut et de bas alors du coup je me laisse le téléphone sous mon oreiller car parfois j’en ai marre de me battre pour me concentrer sur le son que fait mon téléphone et non sur mon acouphènes alors c’est vrai que je le let plus près de mon oreille lors ce que j’en ai marre et que je veux m’endormir sereinement il est vrai que ce n’est pas évident surtout que je ne connais pas la cause de mon acouphènes j’en ai déjà eu un qui a duré un an et qui a disparu spontanément avant de revenir 1 an et demie après sans raison ces parfois tres difficile et surtout lorsqu’on se dit que ça va durer toute notre vie ou que ça risque de s’empirer dans le temps et au niveau de la tonalité de plus je n’ai quasiment personne à qui en parler alors je doit essayer de me consoler et de positiver moi même mais sà reste dur je ne suis plus au point où j’espère qu’il va disparaître j’en suis juste au point Jespere comme vous pouvoir m’y habituer je vous souhaite bien du courage à tous

  • wyman

    Membre
    26 novembre 2021 à 10 h 31 min

    Merci pour ton récit…. c’est encourageant, je vais tester ta méthode 😍

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