Le Silence
Groupe public
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Le silence intĂ©rieur, le silence extĂ©rieur, le monde du silence perdu pour cause d’acouphĂšne… On en parle dans ce groupe.
bruit et bĂȘtise
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bruit et bĂȘtise
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C’est un extrait du Monde comme VolontĂ© et ReprĂ©sentation du merveilleux Schopenhauer.
De mĂȘme Kant, GoĂ«the, Jean-Paul Ă©taient extrĂȘmement sensibles au bruit, comme en tĂ©moignent leurs biographes. GoĂ«the acheta, dans les derniĂšres annĂ©es de sa vie, une maison tombant en ruine et situĂ©e Ă cĂŽtĂ© de la sienne, uniquement pour ne plus entendre le bruit des rĂ©parations. Câest en vain que dans sa jeunesse il suivait le tambour pour sâendurcir au fracas ce nâest pas lĂ affaire dâhabitude.
En revanche, câest une chose Ă©tonnante que lâindiffĂ©rence vraiment stoĂŻque avec laquelle les cerveaux ordinaires supportent le bruit ; quâils pensent, quâils lisent ou quâils Ă©crivent, rien ne peut les troubler, tandis que les cerveaux dâĂ©lite en deviennent incapables de tout travail. Mais ce qui les rend si insensibles aux bruits de toutes sortes, les rend Ă©galement insensibles Ă la beautĂ© dans les arts plastiques, Ă la profondeur de la pensĂ©e ou Ă la finesse de lâexpression dans les arts du discours, bref Ă tout ce qui ne les intĂ©resse pas personnellement. Au sujet de lâaction paralysante quâexerce au contraire le bruit sur les esprits dâĂ©lite, citons la remarque suivante de Lichtemberg, qui trouve ici sa place. « Câest toujours un bon signe, quand un artiste est empĂȘchĂ© par des riens dâexercer son art comme il faut. F. plongeait ses doigts dans de la poudre de lycopode, lorsquâil voulait jouer du piano. Des esprits moyens ne sont pas empĂȘchĂ©s par de telles vĂ©tilles. Ce sont des cribles Ă larges trous. » (MĂ©langes, 1, p. 398.)
Pour moi, je nourris depuis longtemps lâidĂ©e que la quantitĂ© de bruit quâun homme peut supporter sans en ĂȘtre incommodĂ©, est en raison inverse de son intelligence, et par consĂ©quent peut en donner la mesure approchĂ©e. Aussi lorsque jâentends, dans la cour dâune maison, les chiens aboyer pendant une heure, sans quâon les fasse taire, je sais dĂ©jĂ Ă quoi mâen tenir sur lâintelligence du propriĂ©taire. Celui qui fait claquer habituellement les portes, au lieu de les fermer avec la main, ou qui le tolĂšre dans sa maison, est non seulement un homme mal Ă©levĂ©, mais encore une nature grossiĂšre et bornĂ©e. « Sensible » en anglais signifie Ă©galement « intelligent », et ce sens-lĂ procĂšde dâune remarque trĂšs fine et trĂšs juste. Nous ne serons complĂštement civilisĂ©s que le jour oĂč les oreilles seront libres, elles aussi, et oĂč lâon nâaura plus le droit, Ă mille pas Ă la ronde, de venir troubler la conscience dâun ĂȘtre qui pense, par des sifflements, des cris, des hurlements, des coups de marteaux ou de fouets, des aboiements etc. Les Sybarites bannissaient hors de leur ville tous les mĂ©tiers bruyants ; et la respectable secte des Shakers, dans le nord de lâAmĂ©rique, ne souffre aucun bruit inutile dans les villages ; on raconte la mĂȘme chose des frĂšres moraves.
Contenus connexes : -
Enfin, les acs et lâhyper, câest simplement du Ă une surditĂ©. đ
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Celui qui fait claquer habituellement les portes, au lieu de les fermer avec la main, ou qui le tolĂšre dans sa maison, est non seulement un homme mal Ă©levĂ©, mais encore une nature grossiĂšre et bornĂ©e. « Sensible » en anglais signifie Ă©galement « intelligent », et ce sens-lĂ procĂšde dâune remarque trĂšs fine et trĂšs juste.
Je reviens sur le sujet. Ce texte me fait penser Ă mes voisins (jâai lâimpression qu’il y a, par exemple, un concours de celui qui fermera sa porte en claquant le plus fort possible đ ).
Et il est vrai que je me demande sâil nây a pas une limite intellectuelle. đ
Mais je pense que câest plutĂŽt de lâimpolitesse, une incapacitĂ© Ă penser que nous vivons ensemble, une forme dâĂ©goĂŻsme.
Par ailleurs, je pense que nous avons des sens plus ou moins dĂ©veloppĂ©s. Une sensibilitĂ© sensorielle plus ou moins affirmĂ©e. La cause est peut-ĂȘtre fonctionnelle ou psychologique. Je ne sais pas.
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đ
Bien qu’avec Schopenhauer on peut lier l’intelligence Ă la finesse des sens et Ă leur excitabilitĂ© (la richesse et la prĂ©cision des inputs, car comme dit le proverbe : garbage in, garbage out!), d’oĂč son idĂ©e qu’un claqueur de porte, pour ne pas s’insupporter lui-mĂȘme doit donc avoir les fibres un peu Ă©paisses.
En outre, lâĂ©goĂŻsme c’est aussi un signe, non pas de dĂ©faut d’intelligence au sens strict, mais d’un dĂ©faut de perception de la rĂ©alitĂ©. En effet, la spĂ©cificitĂ© de l’humain selon Schopenhauer c’est d’ĂȘtre le miroir du principe mĂ©taphysique (qu’il nomme VolontĂ©, bien que cette VolontĂ© ne soit pas la volontĂ© psychologique et individuelle), or voir la VolontĂ© c’est voir que le principe d’individuation qui fonde lâĂ©goĂŻsme est une illusion. La sĂ©paration qui est perçue dans le monde comme reprĂ©sentation n’a pas cours en rĂ©alitĂ©, au niveau de la chose en soi. Qui parvient le mieux Ă percevoir au-delĂ du principe d’individuation? L’artiste et le saint, deux personnages, deux types d’intellect et d’intuition qui se raffinent et se libĂšrent de l’emprise de l’intĂ©rĂȘt immĂ©diat et Ă©goĂŻste.
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