Essai de synthèse sur les recherches en cours (SHORE-TZOUNOPOULOS)

  • Essai de synthèse sur les recherches en cours (SHORE-TZOUNOPOULOS)

    Publié par winterhascome le 15 avril 2018 à 11 h 37 min

    L’idée est de proposer un essai de résumé de l’étude en cours de Susan SHORE. Pour ce faire, je me permets de synthétiser aussi deux articles, l’un sur l’hyperacoursie, l’autre sur les voies auditives et le phénomène d’apoptose (destruction cellulaire).

    Je vous mets en annexe des schémas réalisés par mes soins. Ils n’ont pas pour ambition de décrire la réalité des fonctionnements. C’est juste une tentative de modélisation des grands principes et de l’esprit des mécanismes. Bien sûr, il faut comprendre que la réalité est plus complexe, les interactions multiples. Par exemple, je ne cite que les cellules fusiformes, alors que dans les mécanismes d’inhibition il y a aussi d’autres cellules importantes qui entrent en jeu (des cellules « à » GABA, les cartwheel, les golgi, etc.). De même, je ne modélise qu’une « couche » par exemple sur le schéma des « codages » au niveau des fibres nerveuses. La réalité est certainement plus complexe, avec des couches multiples.

    Si vous voyez de grosses imprécisions ou erreurs qu’il conviendrait de corriger ça serait super d’affiner le truc.

    Parfois, je place des hypothèses et propositions de modélisation personnelles, non que je sois légitime à le faire, mais parce que j’essaye de faire des liens entre les textes. Il y a des points de jonction, des renvois explicites. C’est comme ça que je vais essayer de faire un lien entre SHORE, TZOUNOPOULOS, et les études sur l’Aotal, l’Oxytocin, la stimulation du nerf vague.

    Donc les textes et références sont les suivantes :

    – Shore :https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5863907/

    – Puel et Lurquin : [lien supprimé car le document PDF n’est plus disponible] – Oxytocin : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5613090/

    – Aotal : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3271548/

    http://www.scielo.br/scielo.php?script=sci_arttext&pid=S0034-72992005000500012&lng=en&nrm=iso&tlng=en

    – Tzounopoulos http://www.jneurosci.org/content/35/23/8829.short (aussi plus simple, ses videos sur youtube)

    FONCTIONNEMENT DE L’AUDITION, ACS ET HYPER :

    voies primaires audition

    voies non primaires audition fibres nerveuses auditives échec rétroaction négative traitement Shore

    Au départ, il y a une onde mécanique (son). Elle touche le tympan, les osselets de l’oreille moyenne, les cellules ciliées externes. Les cellules ciliées externes se contractent et amplifient les mouvements de la membrane basilaire et affinent le message en fréquence.

    En suite dans l’oreille interne, on a les fameuses cellules ciliées internes. Chacune est connectée à une vingtaine de fibres du nerf auditif. A ce niveau, avec la cochlée, l’onde mécanique est transformée en signal électrique. Le neurotransmetteur principal à ce niveau est le GLUTAMATE. Or le glutamate, en excès, est toxique pour les cellules nerveuses.

    Quoiqu’il en soit, de relais en relais, le signal électrique parvient aux noyaux cochléaires où sont situées les cellules fusiformes. Des noyaux cochléaires partent les messages par la voie primaire, et par la voie non primaire. Sur les schémas 1 et 2, vous voyez les noyaux principaux et leurs fonctions.

    Donc, quand le son est trop fort, trop long, etc. bref traumatisant, ingérable, les cellules ciliées vont envoyer du glutamate en excès. Cela va détruire des cellules ciliées et des fibres nerveuses.
    Il faut voir que les mécanismes de protection et de compensation font que l’on peut avoir les voies auditives endommagées mais un audiogramme « normal », pas toujours mais ça arrive.

    Une fois le trauma survenu, ou plus généralement les nerfs endommagés. Se produit un phénomène de « compensation » et de réorganisation central assez rapide. C’est ce phénomène qui va entraîner l’hyperacousie et les acs. Il est postulé que les vieux, qui ont moins de plasticité cérébrale, peuvent perdre de l’audition par vieillesse sans que la réorganisation ne soit efficace = explications en partie des surdités sans H ni acs. Ici les mécanismes de compensation et de réorganisation sont sans doute complexe, d’où les variations entre individus et le fait que certains jeunes un peu sourds n’ont pas d’acs ou H. Mais généralement, un trauma entraîne ces symptômes.

    MÉCANISMES PRODUISANT LES ACS ET HYPER :

    L’hyperacousie est bien un phénomène central qui va atteindre les boucles d’inhibition et de modulation du signal. Au final, au niveau du cortex, le son va bien être entendu plus fort. Ce n’est pas une simple hypersensibilité aux bruits forts, mais un décalage dans le décodage des signaux.

    L’ac va être le fruit d’une erreur de codage du son « silence ». Mal codé, mal décodé, le silence est alors entendu par un ou des sons.

    Il faut avoir en tête que les fibres nerveuses auditives (post cellules ciliées internes) émettent des signaux électriques même sans stimulation, donc pour faire schématique, dans le silence. Autrement dit le SILENCE est CODE. Après trauma, le code est corrompu (Schéma 3), ceci entraîne une levée des mécanismes de rétroaction négatives, un échec des mécanismes d’inhibition du signal (Schéma 4). Les cellules fusiformes notamment se mettent à émettre sans « raison » plus que de coutume, et à se synchroniser entre elles. C’est un phénomène d’emballement, qui causerait, à vide l’ac, et sur les sons l’hyper.

    Ce qui est intéressant ici, c’est de voir que les chercheurs s’accordent sur l’importance du noyau cochléaire dorsal. Les cellules fusiformes se dérèglent facilement au niveau des… canaux potassiques voltage dépendants ! Les fameux Kv7 2.3 étudiés par Tzounopoulos. C’est là une grande partie du mécanisme de la rétroaction négative. D’où certainement le fait que la Rétigabine fonctionnait (de moyennement à fortement) pour les acs. Les nouveaux dérivés de Rétigabine seront plus puissants et plus spécifiques. Restera à voir s’ils permettront de relancer la machine, ou s’il faudra prendre le traitement à vie.

    Voir aussi qu’un noyau cochléaire qui se suractive, ça génère acs et H au niveau du cortex, mais ça génère aussi, par la voie non primaire, une suractivation du système limbique. L’anxiété, la focalisation, l’hypervigilance, la dépression sont partie liées à cette excitation mécanique. Donc c’est pas une question de force mentale. Faut pas culpabiliser, c’est en grande partie mécanique.
    Bien sûr les technique de relaxation vont être essentielles, d’une manière ou d’une autre il convient prendre tout ce qui peut apaiser. Un peu d’apaisement c’est pas grand-chose, mais ce pas grand-chose s’il peut faire basculer la vie dans le supportable, c’est à prendre. Petit clin d’oeil à admin, qui soulignait à juste titre, que plus on est sensible (inhibition latente si je me souviens bien) plus c’est dur. Je crois que c’est parce que plus on est sensible et plus c’est dur de faire contrer la mécanique d’excitation par des techniques de relaxation.
    Quoiqu’il en soit, dans le système limbique, il y a l’amygdale. Or, on peut vraisemblablement agir dessus par… l’Oxytocin 😉

    Reste aussi les médicaments calmants plus classiques qui participent de l’inhibition. Mais d’une manière non spécifique et pas assez ciblé (d’où sans doute les résultats variables en termes d’action sur les acs et H des benzos, parfois ça ne marche pas du tout).

    Mais les alliances de traitement seront peut-être une forme de solution pour essayer de tout ré équilibrer.

    LE COUP DE GENIE DE SHORE :

    Susan SHORE propose de ré éduquer les cellules, de les reprogrammer, sans médicaments ! Comment donc ?

    Ils se sont aperçus que les noyaux cochléaires dorsaux ne reçoivent pas que des messages du nerf auditif. Ils sont le relais et le centre de signaux arrivant aussi du corps (d’où le terme somatosensoriel). Le cou, la mâchoire, les muscles de l’oreille moyenne, trijumeaux, cortex auditif (en feed back certainement), etc.
    Ils sont partis notamment du fait que des douleurs dentaires ou cervicales précédaient parfois l’ac. Que la stimulation de ces zones pouvaient accentuer les acs, etc.
    Notons que je ne sais pas si le nerf vague rejoins le noyau cochléaire. Si c’est pas le cas ou pas directement ça expliquerait à la fois la part de réussite et d’échec de la thérapie par stimulation du nerf vague.

    Ils se sont aussi aperçus que les cellules fusiformes peuvent être mises en état d’hyper excitation ou d’apaisement en fonction des signaux qu’elles reçoivent. Ces états perdurent dans le temps : long term potentiation, et long term depression. En fonction de comment elles sont stimulées ces cellules vont adopter soit une configuration qui les rend excitables, soit une configuration qui les rends résistantes à l’excitation.

    Le principe c’est de jouer sur la stimulation somatique par décharges électrique sur la peau ; et d’autre part sur la stimulation sonore par audition de sons. En fonction du rythme et de l’ordre de la séquence, on obtiendra l’une ou l’autre des configuration : Stimulus Time Dependent Plasticity STDP.

    Le Schéma 5 modélise la chose. Shore explique ainsi pourquoi les thérapies sonores sont insuffisantes : il faut les deux types de stimulation pour ré éduquer les cellules. Les thérapies sonores peuvent endurcir le patient, pas diminuer son H ou son ac. Elles peuvent aussi amortir les différences de puissance dans l’environnement mais au prix de GBB qui sont des acs artificiels en somme.

    Les résultats ont l’air prometteurs. Et je pense qu’il n’y a pas de raison qu’ils ne soient pas étendables à tous les types d’acs. Car ça se joue dans les noyaux cochléaires. D’ailleurs Shore va jusqu’à dire que la majorité des acs sont de type somatosensoriel.

    Voilà, la recherche me semble accélérer et entre Shore, les nouveaux AED, et les médicaments qui agissent modestement et à la périphérie, ont peut espérer une réharmonisation de l’équilibre cérébral des acouphéniens. Ajoutons à cela la relaxation et, espérons, les thérapies géniques. Ça avance, il me semble. Qu’en pensez-vous ?

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    houarneau04 a répondu il y a 4 mois, 3 semaines 15 Membres · 120 Réponses
  • 120 Réponses
  • winterhascome

    Membre
    15 avril 2018 à 11 h 38 min

    Damnation je n’arrive pas à mettre des schémas.

    Quelqu’un sait comment on insère des images (quel format) ?

  • blendman

    Membre
    15 avril 2018 à 17 h 29 min

    Salut

    Merci beaucoup pour les infos. C’est intéressant, en espérant que des traitements puissent voir le jour rapidement suite à ces découvertes.

    En gros, il faudrait un gbb qui envoie en plus des petites décharges électriques 🙂 ?
    Par contre, il faut donc des séquences sonores et électriques qui créent un état résistant aux stimulations, c’est ça ?

  • winterhascome

    Membre
    15 avril 2018 à 18 h 10 min

    @blendman

    Dans le protocole de Shore, je ne crois pas que ça soit un bruit blanc, plutôt un son similaire à celui de ton ac. Ils t’envoient une décharge électrique sur la peau du cou, puis une demi-seconde plus tard (ou 0.05s) un son dans l’oreille. Ceci toutes les 30 secondes je crois, pendant 1h20, tous les jours durant deux semaines (quelque chose comme ça, j’ai pas les détails en tête). Cela modifie le comportement des cellules fusiformes qui deviennent moins excitables. Et la conséquence c’est qu’elles envoient de potentiels d’action en solo, et qu’elles se synchronisent moins entre elles.

    Le truc que j’ai pas compris c’est si cette restructuration a à voir avec les canaux potassiques des cellules fusiformes ou si c’est encore un autre paramètre.

    Voilà c’est donc à peu près ce que tu as compris, mais les réglages doivent êtres fins je pense et on peut pas faire ça à la maison sans matos et sans toucher un peu sa bille en programmation. Quoique ça doit être faisable. Il y a des ingénieurs et autres informaticiens sur le forum qui se sentiraient de creuser pour nous bricoler un protocole maison ?

  • winterhascome

    Membre
    15 avril 2018 à 18 h 13 min

    J’ai beau faire je n’arrive pas à insérer des images. J’ai 5 images, j’ai bossé dessus durant deux heures ! Quelqu’un pour m’aider ? Et je vous assure c’est une super synthèse du texte 😉

  • orion

    Membre
    15 avril 2018 à 18 h 26 min

    Merci winterhascome,

    c’est dommage de ne pas avoir mis ces explications dans le fil déjà existant sur Shore.
    J’y explique justement le protocole d’essai, ça aurait fait un condensé.

    Le premier essai sur les humains avait duré 4 semaines, pause, et de nouveau 4 semaines (randomisé et en double aveugle).

    Pour ce qui concerne le son envoyé, oui, j’avais compris qu’il s’agissait de la fréquence de l’acouphène. Donc, pas du tout de bruit blanc.

  • orion

    Membre
    15 avril 2018 à 18 h 29 min

    Les thérapies sonores peuvent endurcir le patient, pas diminuer son H ou son ac. Elles peuvent aussi amortir les différences de puissance dans l’environnement mais au prix de GBB qui sont des acs artificiels en somme.

    As-tu le lien vers ces affirmations ?
    Car ça m’étonne les GBB sont des acs artificiels.

  • winterhascome

    Membre
    15 avril 2018 à 19 h 23 min

    @orion

    Je sais pas si c’est pertinent de faire un copier-coller dans le fil sur Shore?

    Sur les GBB c’est une interprétation de ma part : c’est LURQUIN sur le lien n°2, qui dit que la reconfiguration cérébrale post trauma peut être annulée en faisant croire au noyaux qu’ils reçoivent autant d’infos qu’avant? Pour ça il faut mettre des GBB assez fort. (LURQUIN, p.26) Il ne le précise pas mais comme les cellules sont irrémédiablement foutues, il y a de fortes chances qu’à l’arrêt des GBB la reconfiguration se produise. Je lui ai envoyé un mail, mais il n’a pas voulu me répondre en prétextant qu’il faut faire une consultation (comme si je parlais de mon cas 🙁
    Dans ce contexte il me semblait juste de dire que pour éviter l’H et les acs s’il faut mettre un GBB à fond… ça équivaut à se mettre un ac artificiel. Toute la question serait de savoir si à l’arrêt du GBB on évite H et acs. Mais pas de réponse…

    Plus loin dans le texte il dit que certaines douleurs H viennent du fait que ça déclenche très tôt quand le son est perçu, alors qu’une oreille normale va monter plus doucement en charge (ou plutôt en décharge !). Avec un GBB on a un niveau constant de son qui amortit du coup pas mal de sons. Ca diminue les contrastes, et donc, les bruits d’impacts les plus faibles seront noyés et ne causeront plus de douleur. Les bruits plus forts auront un contraste plus faible et feront moins mal. (LURQUIN p.27)

  • winterhascome

    Membre
    15 avril 2018 à 19 h 26 min

    Petites rectifications sans grande importance :

    – Il faut envoyer le son en premier et non le courant, comme dit dans ma synthèse. Sinon ça fait l’effet inverse !

    – Les durées et intervalles entre les stimuli sont bcp plus courts que ce que j’indique.

    – Cette technique a effectivement un impact sur les canaux ioniques membranaires.

  • orion

    Membre
    15 avril 2018 à 20 h 45 min

    @winterhascome

    Merci pour ta réponse.
    Il faut que j’aille lire l’article de Lurquin qui a l’air très intéressant.

    J’avais lu des articles de lui sur l’hyperacousie, c’était très toujours très intéressant.

    Comme je l’ai écrit ailleurs, je fais une TRT hyperacousie et, non ! on ne met pas les bruits blancs forts. L’hyperacousie ne supporte pas de subir des sons forts.
    Si un thérapeute fait ça, il risque d’aggraver l’hyperacousie.
    On débute à un niveau sonore à peine perceptible pour ensuite augmenter très lentement sur plusieurs mois et diminuer comme tu dis le contraste entre le bruit blanc perçu en continu et les bruits extérieurs (plus forts que le BB).

    En parlant de BB, on utilise les BB car ce sont des sons qui calment le système limbique.
    Les parents utilisent le BB pour aider leur bébé à s’endormir. 🙂

    Le BB n’est pas comme un ac. Je te jure que si tu pouvais éteindre ton ac comme on arrête un BB, tu serai le plus heureux du monde !

    Bon, je suis hors-sujet, j’arrête. 😉

    Je pense que tu peux copier ton compte-rendu intéressant sur l’autre fil Shore. 🙂

  • orion

    Membre
    15 avril 2018 à 20 h 49 min

    Je rajoute mon avis:
    Susan Shore a totalement raison de dire que les thérapies actuelles sont insuffisantes (TRT, TCC).

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