“J’ai toujours aimé le silence” (Daniel Pennac)

Daniel Pennac

Daniel Pennac et le hamac

« J’ai toujours aimé le silence. Je l’aime avec passion, comme d’autres aiment la musique. Ce que je reproche le plus à l’acouphène qui me traverse le crâne depuis quelques années, ce n’est pas de faire du bruit, c’est de me priver de silence. J’ai dans la tête une fuite aiguë – gaz ? vapeur ? fraise de dentiste ? cigale folle ? – qui me vole les qualités du silence. Quand tout se tait, je suis suspendu dans l’espace par cette note unique. Mais à l’époque dont je parle, ah ! les beaux silences ! j’en faisais collection. Celui qui s’installa dans notre avion, après que le commandant de bord eut confirmé le diagnostic du chimiste, y tient une bonne place.

Désolé.

Une avarie.

Contraints de nous détourner.

L’aéroport le plus proche.

Si possible.

Pas de panique.

Silence compact ; matière humaine à l’état brut, où se nouait ma propre peur. Un des plus beaux silences de ma collection.

(Pour en trouver un aussi « habité », il faut, toutes catégories confondues, remonter au silence de mon père immergé dans ses lectures : fauteuil, lunettes, vieux pull de laine, cône de lumière, fumée de pipe, promenade du médius et de l’annulaire sur sa tempe, jambes croisées, balancement léger du pied droit, la ponctuation d’une page qu’on tourne… Il n’était jamais aussi présent que lorsqu’il nous abandonnait dans ce silence-là.) »

Daniel Pennac, le dictateur et le hamac

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Réponses

  1. J’essaie à nouveau, je crois que mon message ne s’est pas inscrit :

    Je te demandais juste si, dans ton avion, les réacteurs ne faisaient pas de bruit ? Cela m’étonne beaucoup. Le silence est donc relatif.

  2. le silence n’est pas perdu il reste celui de l’esprit.pas qu’on entend pas mais que le cerveau était en mode plaisir: un plaisir comme regarder du haut de montmartre les lumières éclairés paris.