Avec Deroxat, deviens un Bibendum gonflé à l’hélium !
“Facebook n’a aucun intérêt, c’est naze, lol kikoo mdr” peut-on entendre ici et là. Ce n’est certes pas la fréquentation de Facebook à elle seule qui va enrichir le cœur et l’esprit.
Mais telle n’est pas sa vocation.
Lorsque l’on se donne la peine de farfouiller un peu, on découvre toujours quelques éléments intéressants. Ainsi un groupe sur lequel je suis tombé récemment, qui s’intitule Café du commerce des belles âmes dépressives et de la délectation morose [le groupe n’existe plus] :
Un bistrot pour les belles âmes dépressives et pour les praticiens de la délectation morose.
(Attention! Ce bistrot ne sert pas d’eau ni de boissons sucrées; uniquement du café noir, de la suze, de la gentiane, du Picon-Bière, de la vodka et de l’absinthe.)
Les fumeurs sont autorisés.
Vous êtes les bienvenus dans ce café où vous pourrez tenir les propos de comptoir de la mélancolie doucement enivrée.
Il est fait pour vous si:
Vous préférez l’authentique tristesse de Senancour et de Léopardi, lasse et désabusée, aux lamentations du René de Chateaubriand et du Werther de Goethe, un peu trop excités à votre goût pour être honnêtes.
Vous n’imaginez pas la vie sans Xanax ni Séroxat (pour ne rien dire de plus).
Vous reconnaissez les traits de votre péché le plus propre dans la mention qu’en fait la Somme théologique de saint Thomas d’Aquin à l’article 2 de la question 31 («On dit d’une chose qu’elle dure ou qu’elle est “morose”, en fonction du temps. Or il y a des délectations qu’on appelle moroses. Donc le plaisir ou délectation est dans le temps») et à l’article 6 de la question 74 («La délectation est appelée “morose” non pas à cause de sa prolongation [mora], mais du fait que la raison délibérante s’y attarde [immoratur], au lieu de la repousser. Comme dit Saint Augustin: “ On retient et on rumine avec plaisir ce qu’on aurait dû rejeter aussitôt que l’esprit en a été frôlé.”»).
Vous pensez que, comme Pierre Klossowski l’écrit à propos de Sade (grand praticien, dans sa cellule, de la délectation morose), cette notion de délectation morose “formée par les docteurs de l’Eglise médiévale exprime singulièrement cet état caractéristique des générations postérieures aux âges de la foi, comme si ces connaisseurs profonds du cœur humain avaient appréhendé le mal des temps modernes”.
Vous aussi vous auriez écrit à Odilon Redon comme le fait Mallarmé dans une lettre du 2 février 1885, en marquant votre préférence pour la lithographie “Dans mon rêve je vis au ciel un visage de mystère”: «Mais mon admiration tout entière va tout droit au grand Mage inconsolable et obstiné, chercheur d’un mystère qu’il sait ne pas exister et qu’il poursuivra à jamais pour cela, du deuil de son lucide désespoir, car c’eût été la vérité!»
Comme vous pouvez le constater, une erreur impardonnable s’est glissée dans ce texte… Le Séroxat n’existe pas, il s’agit bien entendu du Deroxat, comme le fait justement remarquer une membre du groupe, Florence :
Le DEROXAT. Capable de faire prendre dix kilos en deux mois et de donner des vertiges dignes de l’Empire State Building !
Ah, le Deroxat… Mon premier anti-dépresseur, pris de juillet à octobre (ou novembre, peu importe) 2003… Nostalgie, quand tu nous tiens ! 😉
Mais Florence, je m’incline : si j’ai bien souvenance d’avoir plané dans les hautes sphères, il est incontestable que j’ai mis six mois à prendre les dix kilos dont tu parles, là où il ne t’en a fallu que deux : chapeau Florence !
(non ce n’est pas le Bibendum Michelin mais bien Marshmallow man de SOS Fantômes / Ghostbusters, qui est gros et gras comme un Gagou mais ne semble pas souffrir de vertige)
Aah Bibendum… il restera toujours dans mon coeur.Allez, pour la peine, cette petite vidéo qui fera chavirer les plus tendres : [la vidéo n’est plus disponible]
« “Facebook n’a aucun intérêt, c’est naze, lol kikoo mdr” peut-on entendre ici et là. »
Oui, si on est un lecteur de skyblog on doit pouvoir lire ça. Maintenant si on est plutôt un lecteur d’analyses de sociologues, on ne verra jamais “lol kikoo mdr” ni “c’est naze”. On verra plutôt un argumentaire construit, qui pour ceux que j’ai vu, arrivent à la conclusion que Facebook permet de donner libre cours à son narcissisme.
Comme pour tout produit de consommation (car il ne faut pas se leurrer, Facebook est une entreprise dont le but premier est de générer du profit) dans la société consumériste, l’usage premier du produit s’efface derrière la fonction de signe. En s’inscrivant sur Facebook, on envoie un signe, on parle un langage, une norme. Lequel permet artificiellement de se sentir une meilleure personne.
Puisque tu abordes le sujet des sociologues, tu as sans doute lu ce papier :
The phrase Old Masters is sexist, authors and students are told
Je suis curieux de connaître ton avis sur le sujet.
J”aime beaucoup ce texte humoristique et littéraire de Florence qui m’a donné envie de lire Sénancour dont je n’avais jamais entendu parlé. Je suis, en revanche, moins réceptif à ce salmigondis d’expressions sociologiques multipliant les lieux communs.
Nul besoin d’accumuler les ouvrages en sciences humaines pour étaler ce genre poncifs camouflées derrière deux ou trois mots creux.
On ne fait qu’envoyer des signes… C’est quoi ” se sentir une meilleure personne” en sociologie ?… pourquoi “artificiellement” ? “on parle un langage ,une norme” tout langage est une norme…
Désolé de ne pas atteindre des sommets dans ta discipline de prédilection. Il semblerait que tu aies quelques difficultés à décrocher ton BEPC en sociologie…
Si la rhétorique n’est pas ton fort, tu peux, tel Alex 35, te rabattre sur le langage ordurier et la calomnie plus accessible aux basses couches de la société.
petite précision: seroxat existe… c’est la dénomination du deroxat en Belgique… dont le principe actif est bien la paroxétine.
Merci pour cette précision. Les touches “d” et “s” étant proches sur le clavier, on pouvait légitimement penser qu’il s’agissait d’une coquille… Au final, Seroxat = Deroxat. Simplement en franchissant la frontière. C’est une pratique fréquente chez les fabricants de médicaments, ça ? Pas simple de s’y retrouver…