Acouphene : espoir de traitement ?

La science des rêves

La fin des acouphènes ?

Les acouphènes, ces sons qui sifflent ou bourdonnent dans la tête de manière plus ou moins permanente sans que la moindre source sonore extérieure ne puisse les expliquer, gâchent la vie de 5 millions de Français. Longtemps considéré comme un trouble psychologique, ces sons fantômes ne bénéficiaient jusqu’ici d’aucun traitement efficace permettant de les faire taire. Une situation en passe de trouver une issue…

C’est sur ces mots que débute l’article sur les acouphènes du magazine Science & Vie d’avril 2010, intitulé “acouphènes : enfin un espoir de traitement“. Plus que d’espoir de traitement, l’auteur, Marine Cygler, va jusqu’à affirmer que, je cite, “la situation est en passe de trouver une issue” [Marine Cygler se pose ainsi, d’une certaine façon, en Francis Fukuyama des acouphènes…].

Que révèle donc ce papier de si prometteur pour oser une telle affirmation ?

Pas grand chose de neuf malheureusement. D’un coté, l’INSERM de Montpellier des professeurs Jean-Luc Puel et Rémy Pujol poursuit courageusement ses essais cliniques. Science & Vie nous parle du modèle animal d’acouphènes, en l’occurence sur des rats, mais ne rappelle pas que sa mise au point remonte à près de dix ans déjà. Science & Vie nous informe ensuite que les docteurs Puel et Pujol ont réussi non seulement à créer des acouphènes chez des rats mais surtout… qu’ils ont réussi à les faire disparaître ! Là encore, Science & Vie ne précise pas que cette prouesse était déjà réalisée aux alentours de 2003 / 2004.

Quid des hommes donc, puisque c’est tout de même ce qui nous intéresse en premier lieu ? Pour faire court, l’injection d’anti-glutamate dans l’oreille moyenne voire dans l’oreille interne permet jusqu’à trois semaines de disparation des acouphènes chez les patients qui ont été traités. Encourageant en effet ! Enthousiasmant même ! Mais malheureusement, comme avaient averti les professeurs Puel et Pujol dès le début de leur recherche, ce traitement ne fonctionne que sur des acouphènes récents (moins d’un an). Il n’est pas du tout certain que cette piste aboutisse, même dans un avenir lointain, à la guérison des acouphènes plus anciens. Au final, on peut imaginer un monde débarrassé des acouphènes, du moins dans nos sociétés occidentales… sauf chez des personnes comme moi qui ont des acouphènes anciens. La recherche s’arrêterait alors : le problème étant réglé, il ne resterait plus alors qu’à atteindre patiemment la disparition des derniers acouphéniques français, comme l’on a attendu celle des derniers poilus. Pas ou peu de potentiel économique, en tout cas sans doute pas suffisamment pour justifier une course effrénée vers un “médicament acouphènes”, une pilule miracle que des années de recherche ne suffiraient peut-être pas à produire ! Aucune garantie de résultat, la seule garantie étant du budget de recherche dépensé à perte pendant des années ! Bref, pas sûr qu’il y ait matière à se réjouir pour nous autres acouphéniques actuels.

Rien ne justifie donc l’affirmation de Science & Vie. A moins que l’espoir se situe dans la deuxième piste de recherche ? Science & Vie n’y concerne que quelques lignes : la stimulation magnétique transcrânienne répétitive. Mais on ne parle plus là de guérir : le magazine emploie fort justement le terme “limiter”. “Limiter la perception de l’acouphène”. Pour une guérison totale, il faudra repasser. Nous ne savons que trop ce que ce type de précaution lexicale laisse supposer. Il suffit de lire les ORL et autres psychothérapeutes comportementaux (ou “comportementalistes”, ça sonne moins “porte-manteaux”) se gargariser du succès retentissant des TRT, qui “soulagerait” 80% des personnes qui souffrent d’acouphènes. C’est loin d’être faramineux lorsque l’on sait que ces mêmes ORL et psychothérapeutes du comportement affirment sans sourciller que 20% seulement des personnes qui souffrent d’acouphènes en sont “gênés”. Souvenons-nous cependant qu’il y a seulement quelques années, ces mêmes scientifiques parlaient non pas de 20% mais de 5% !

C’est justement à le mérite principal de l’article de Science & vie : rappeler une évidence qui ne l’est pas pour tout le monde. Les acouphènes ne sont pas une entité uniforme, “unitaire” comme diraient les socialistes de Martine Droopy. Bien au contraire : il y a autant d’acouphènes que d’acouphéniques. Et de remettre quelques chiffres derrière tant de souffrance(s) :

Sur les 5 millions de Français touchés par les acouphènes, 1,6 million les qualifient d’agressifs [ce qui fait d’ailleurs plus de 20%…] et 300 000 d’intolérables. On estime que chaque ORL reçoit chaque année 70 nouveaux cas, lesquels dans la grande majorité perçoivent des acouphènes de haute fréquence (sons aigus).

Avant de retomber malheureusement dans un écueil :

Vieillissement de la population mais aussi utilisation généralisée de baladeurs type mp3 sont montrés du doigt en ce qui concerne la perte d’audition s’accompagnant parfois d’aberrations auditives.

Nulle part, une fois encore, n’est indiqué qu’il suffit d’une seule soirée, d’un seul concert, d’une petite rave pour détruire son oreille avec les conséquences que l’on connaît !

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Réponses

  1. ” 20% seulement des personnes qui souffrent acouphènes en sont « gênés »”

    Comme s’il s’agissait d’une cicatrice superficiel qui poserais “problème” le moment venu de s’exposer à la plage.
    J’admets que dans certaines situations, elle ne me gène pas mais cette appréciation reste subjective et intrinsèquement variable d’une personne à l’autre.

    Pour revenir sur les mp3, il faudrait que j’en lise plus étant donné que je deviens gentillement un adepte (pas du mp3 bien sûr mais de la musique portable).
    J’ai d’ailleurs demandé à un labo de l’EPFL si je pourrais aller faire des mesure de pression sonore de mon casque sur des oreilles artificielle afin de fixer les limites.

    Merci pour ce rappel des faits.

    Leur as-tu écris afin de leur mettre sous les yeux la réalité de la situation, si oui quelle était leur réponse ?

    😉

  2. “l’ultime espoir reste la régénération des CCs”

    J’avais envisager débuter mes études en science et genie du vivant afin de travailler plutard sur ce front de recherche… J’ai choisi une autre voie mais je me demande toujours parfois si …

  3. la totalité des gens qui ont des acouphènes s’en plaint. Quand les acouphènes sont de faible intensité, après une période difficile les gens finissent par se résigner à vivre avec ça.
    Pour les autres, quand les acouphènes ne peuvent plus être qualifiés de faibles, c’est la souffrance quotidienne surtout le soir pour s’endormir.

    80% des acouphéniques ne se plaignent pas et parmi les 20 % restants, la TRT est efficace dans 80 % des cas. Si cette information est exacte, cela voudrait dire que les acouphènes sont une maladie (ou le symptôme d’une maladie) rare qui n’affecte pas grand monde.

  4. Un ami m’a prêté ce magazine. J’ai lu entièrement l’article et je trouve qu’il est très bien fait. Bravo à Marine Cygler pour cet excellent article écrit dans un style concis et clair sans fioritures de pseudo-intello à la noix

    Il n’y a pas de mensonges, ce qui, en ce qui concerne les acouphènes est assez rare pour être souligné.

    D’autre part, on nous épargne enfin les sempiternelles TRT et TCC dont on sait très bien qu’elles ne donnent pas de résultats probants. Si chacune de ces pseudo-thérapies étaient efficaces dans 80 % des cas comme on peut souvent le lire, le problème serait résolu et les acouphènes seraient une maladie rare.

    Dès le début, la journaliste fait état de la situation et tort le cou à toutes les idées reçues et souvent entretenues sur les acouphènes:

    ” Pénibles, obsédants, parfois douloureux et dans tous les cas handicapants: tels sont les acouphènes, ces vrombissements, bourdonnements ou sifflements aigus … Un mal plus fréquent qu’on ne pourrait le croire puisqu’il gâche la vie de près de 5 millions de français …Il est aujourd’hui établi que les acouphènes ne résultent pés d’un désordre psychologique mais d’un dysfonctionnement du système auditif …”

    On est très loin des chiffres des docteurs Londero et Peignard selon lesquels seulement une petite minorité d’acouphéniques se plaindrait. Chiffres destinés à l’évidence à minimiser et camoufler le problème un peu comme on balayerait la poussière sous le tapis ou poserait une tapisserie neuve sur un mur maculé par l’humidité.

    Que ce soit la stimulation magnétique ou l’antiglutamate, ça fait du bien de voir qu’il y a autre chose que les éternelles TRT et TCC. Même si les résultats ne sont pas encore probants, ce sont de vraies pistes et non des pseudo thérapies vieilles de plus de 30 ans comme la TRT ou la TCC. Si ces dernières donnaient des résultats ça se saurait depuis longtemps. J’ai consulté beaucoup d’ORL, soit ils ne m’en ont même pas parlé (ce qui est stupéfiant pour des thérapies sensées être efficaces dans 80% des cas) soit ils m’o t dit ouvertement que ça ne donnait aucun résultat et qu’on en parlait uniquement pour proposer quelque chose ( pour meubler le vide en quelques sorte).