Journée de merde

journée de merde

Vendredi. 20h30. Saint-Lazare. Métro, ligne 14. Sortie de bureau. Soirée froide et pluvieuse.

Grosse journée au bureau. La veille ma deuxième angine du mois m’a traîné chez un médecin du quartier. Lorsqu’au cours de la discussion je lui ai expliqué que je souffrais d’acouphène – ceci afin d’éviter la prescription de médicaments ototoxiques – il a fait la moue et m’a répondu d’un air triste que sa première femme restait parfois prostrée des jours durant. Dans le noir. Sans bouger. A attendre. Que sa crise d’acouphènes disparaisse.

Cela pouvait dure une semaine, dix jours. Deux semaines. Rarement plus. Mais à chaque fois elle était terrassée. Telle un lapin sans Duracell.

Il a donc tâché de me redonner espoir (« Je suis certain que ça passera d’ici l’été prochain ! ») et m’a raccompagné à la porte, tout en me souhaitant bon courage.

Ce vendredi, donc, a été particulièrement délicat et c’est tant bien que mal que j’ai traversé la journée. Soulagé de pouvoir enfin me reposer un peu mais sur les nerfs (et plus encore) car dans l’obligation de travailler le week-end avant une réunion qui s’annonce, quoique je puisse faire, houleuse.

La navette arrive et je monte à l’avant du train. A ma gauche se trouve un jeune renoi – ou keubla, choisissez votre mot bien-pensant favori utilisé pour désigner un Noir.

25 ans, sapes de luxe.

Modèle semi-racaille.

Rebelle intra-muros.

A ses côtés, son harem. Deux donzelles qui ne semblent avoir de raison d’être que dans les rires gras et lourds dont elles accompagnent chaque propos du mâle en question.

Le métro démarre. A demi-plein. A demi-vide. Très vite je perçois les mots du coq de la Capitale.
– Matez moi cette gueule de con.
Rires de ses femelles.
– Face de blanc de merde.
Et de rire à nouveau.
– Non mais sérieux, je ressemble à ça je me cache.
– Qu’est-ce qu’il est laid putain, il ressemble à rien.
– Le con il voit même pas qu’on parle de lui, quelle merde.
Ou encore :
– On doit pas voir la même chose dans la glace le matin, c’est pas possible.
Saupoudré de quelques « putain de blanc » bien sentis (si l’on peut dire… je me méfie de la Halde).

Le cirque dure bien deux ou trois minutes mais il est évident que je suis le sujet de toute cette attention.
Par acquis de conscience et tout en feignant de n’avoir rien remarqué, je décide un mouvement soudain : me pencher vers mon parapluie posé à mes pieds.

Hilarité générale.

– Blanc de merde ! Je trouve plus mes mots putain.

Je plante alors mon regard dans le sien. Il est secoué de rire tout en couvant ses femelles du regard mais s’aperçoit soudain de mon changement d’attitude.
– Tu as un problème ?
La surprise le transfigure. A cet instant précis je sais que je ne risque rien.
– Tu as un problème ?
Un jeune homme de mon âge est monté dans la rame à la station suivante. Il vient s’asseoir en face de moi, ipod vissé dans les oreilles, et regarde aussitôt vers le sol.
– C’est bon, me répond à demi-voix le chef de bande.
Je résiste à la tentation fugace de rentrer dans son jeu. Visiblement il n’attend de ma part qu’une remarque raciste – ou du moins supposée comme telle.
– Si tu as un problème on le règle.
– C’est bon.
– T’as pas de problème ? Alors tu fermes ta gueule.
Il ne soutient pas mon regard. Ses deux poules sont sans réaction. Je réalise aussitôt que je suis tellement excédé en cette soirée qu’il doit le lire dans mes yeux comme dans sa Sony PSP. Et qu’ainsi, même si je suis tout sauf une armoire à glace, il sait, il sent que je suis près à lui sauter à la gorge.
– C’est bon, lâche-t-il encore du bout des lèvres.
– Tu fermes ta gueule. De suite.
– C’est bon.
Dialogue surréaliste. Les gens dans la rame font mine de ne rien voir. Rien entendre. Chacun regarde ailleurs.
– J’ai dit de suite.
– C’est bon.
Il ne soutient pas mon regard et ne sait où reposer ses yeux.
– Bordel mais tu connais que trois mots ? « C’est bon », l’imitais-je, narquois. Putain mais retourne à l’école, ouvre un dictionnaire, je sais pas.
– C’est bon.
– Allez ferme ta gueule et dégage, concluais-je tout en détournant mon regard.

Et lui d’obtempérer.

A ma grande surprise.

Ô je ne dis pas qu’il s’est levé sur-le-champ ! Mais il n’a plus prononcé un mot et est descendu deux stations plus tard. Ses deux greluches collées au cul.

Journée de merde. Putain.

_______________________________________Mise à jour du 29 septembre :

Je viens de recevoir le mail suivant. Je me demande pourquoi ne pas l’avoir laissé en commentaire, quoiqu’il en soit je trouve ce genre de propos assez éclairant. Je vous laisse juger.

Bonsoir,

j’ai lue ton blog , la journé du 28 septembre et tu me fait bien rire. Si tu croit kelkun va te croire quand tu raconte tes mensonges de mitoo tu te mai le doigt dans l’oeuil.

Ca se voit que c’est des kraks de mytho qui veut se la jouer. On y croit pas une segonde.
Moi je suis black et je peut te dire que t’es un raciste ça sent à plein nez le raciste ton blog.
Et on peux me dire que je suis renoi ou kebla ou je sai pa koi, je m’en fiche.

C’es pas parkil y a des racailles noirs qu’il faut etre raciste envers les noirs. Il faut etre kontre les racaille jveux bien mais pas les noirs.

Alors change ton texte de mito dans ton intérêt car tu te ridiculise avec ça , personne va y croire.

On dirait un film de beauf avec CHUK NORIS lol.

ET en plus tu propage des idés racistes sur le net.

C’est mauvais ce que tu fais.

sincérement

Un black

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Réponses

  1. C’est abbérant, comme scène…
    et si courrante!
    Attitude ok, sérieux, j’aurais sans pas osé moâ.
    et bien de mettre le mail du gars qui se cache. on dit noir (blakos, renoi etc… c’est nul)
    aller, face de Blanc, je t’embrasse, 😉
    M.

  2. @”Un black”, ton texte est assez curieux: tu peux à la lecture d’un seul billet juger si quelqu’un est mythomane et la ligne éditoriale du blog raciste… c’est peut-être un peu juste. Randy est comme tout le monde après une rude journée de boulot et au surplus en supportant une angine veut au moins pouvoir rentrer tranquille chez lui que l’opportun soit black, roux, peau rouge ou martien ne change rien au sentiment de fatigue et d’exapération face à ce genre de rencontre. Il n’y a pas à chercher plus loin…

  3. Bravo Laurent pour ton self control.
    Te connaissant je sais que tu n’aurais pas réagit en période normale
    (Car tu es vraiment au dessus de cette attitude là).
    Mais ce vendredi, c’était la journée de trop et fallait pas te faire chier, c’est tout !
    Pauvre type, il a mal choisit le jour et sa cible,
    la prochaine fois il prendra une victime plus facile.
    Détends toi et détends toi encore …
    Des cons on en rencontre trop souvent malheureusement.

    Bon courage pour ta réunion de Lundi …

  4. Fallait lui démolir sa race 😉 il aurait moins fait le paon. plus Sérieusement, la violence est pour
    bon nombre d’hyperac, difficile à canaliser.
    c’est raisonner dans l’absurde mais je crois qu’à ta place du fait de l’hyper je lui aurais défoncé la tête dans une conduite suicidaire.
    Un psy m’avait parlé d’un militaire très violent en HP. Personne ne savait ce qu’il avait. Au moindre bruit, il se mettait à frapper le personnel. Le psy décide de l’inviter au calme dans sa villa du sud (sympa…). Et là, il voit la santé de son patient nettement s’améliorer en quelques jours. Le psy ne connaissait pas la signification du mot hyperacousie”…

  5. Nono, tu es un vrai puits de savoir… Tu as de ces anecdotes !

    Pour ma part, j’ai toujours beaucoup intériorisé. Ceci explique sans doute cela 🙂
    Mais il est évident que lorsque l’on est agressé en permanence du fait de l’hyperacousie et/ou des acouphènes, on a les nerfs à fleur de peau et il peut suffire d’un rien pour faire déborder le vase…

  6. C’est sur que si tu enlèves les commentaires quand qq chose dedans te déplaît… on ne peut pas savoir vraiment ce que pensent les gens
    moi perso je ne suis blanche et ton “anecdote”, je n y crois pas non plus…
    et quand bien même y aurait un peu de vrai, je ne vois pas pourquoi tu reprends les propos du jeune homme qui t a envoyé un message, tout à fait poli qui te donnais son conseil, parce qu il s est senti blessé par tes propos
    Peut être parce qu il est noir?
    qu est ce que tu veux nous prouver sinon?

    caro

  7. @anonyme :
    “C’est sur que si tu enlèves les commentaires quand qq chose dedans te déplaît…” ??? Je n’ai (jusqu’à aujourd’hui) jamais censuré le moindre commentaire. Je ne comprends donc pas ta phrase.

    Si je reprends ses propos, c’est précisément parce que la même anecdote, dans “l’autre sens”, n’aurait pas entraîné de doute sur son authenticité… et tu viens magnifiquement étayer mes propos (au passage, je n’ai jamais reproché quoi que ce soit à ce garçon).

  8. Et bien… que tout cela est affligeant ! Respect à toi et à vous tous Parisiens qui êtes plus exposés que nous, en province, à ce genre de situation. Et j’adore les commentaires des donneurs de leçon qui signent “anonyme”…
    AFFLIGEANT.