“Ecoute ton oreille” : l’INPES pointe les risques auditifs
L’INPES communique sur les risques auditifs auprès des jeunes
Partant du constat de l’augmentation de l’utilisation de lecteurs MP3 chez les jeunes et de la fréquentation assidue aux concerts et dans les discothèques, et de l’exposition précoce à la musique amplifiée, l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) annonce le lancement d’une campagne de sensibilisation destinée aux 13-25 ans. Le dispositif, orchestré par DDB Paris, comprend trois spots radio, diffusés jusqu’au 12 novembre, qui mettent en scène différentes situations à risque (“Concert”, “Baladeur” et “Discothèque”), un site pédagogique dédié qui sera mis en ligne le 25 octobre prochain (www.ecoute-ton-oreille.com [le site redirige désormais vers Santé Publique France]) et la diffusion de bannières web. Des brochures (tirées à un million d’exemplaires) seront également distribuée dans les discothèques et les salles de concerts par l’association Agi-son. La campagne comporte également l’organisation d’un concert de mobilisation, le 15 décembre prochain, pendant lequel les artistes mobilisés (Marc Antoine, Magic System, China, Zao…) enregistreront en coulisses un message audio et vidéo sur la prévention des risques auditifs qui seront ensuite diffusés en radio et le site dédié, fin décembre.
(lu ce jour sur le site de CB News, sous la plume de Virginie Baucomont)
“Chouette, une campagne !” a été ma première réaction. Bien naturelle. Avant de rapidement tempérer mon enthousiasme.
On peut d’emblée regretter la platitude du message. Je suis le premier à dire que, trop cru, celui-ci peut entraîner une réaction de rejet mais… à force de se montrer flou on en devient contre-productif.
Attardons nous un instant sur la signature (le “slogan”, pour les gens du peuple 😉 ) :
“A force d’écouter la musique trop fort on finit par l’entendre à moitié“.
“A force de”, “on finit par”… On retrouve là le même écueil que dans les messages affichés depuis des années sur tout Boombox de poche, du baladeur à cassette à l’ipod, en passant par le Discman et autre lecteur de Minidisc : l’idée que c’est l’accumulation, la répétition qui, à l’usure, endommage peu à peu, lentement le système auditif.
Partant, l’idée qu’écouter “de temps en temps” la musique “trop fort” ne présente aucun danger.
Or, fidèles lecteurs, vous le savez : il suffit d’une fois, une simple soirée trop exposée, pour voir son système auditif irrémédiablement endommagé (au passage, vilipender l’écoute de la musique à un niveau “trop élevé” c’est un peu comme encourager la “modération” dans la consommation d’alcool : une coquille vide, un néant intellectuel. Il vaudrait mieux dans ce cas s’abstenir de prendre la parole).
Autre erreur habituelle à laquelle on n’échappe pas ici : on ne parle que de perte d’audition. L’idée (en terme de publicité et communication) sous-jacente est, probablement, que c’est ce qui est le plus facile à appréhender par la cible en question – ce qui est discutable – et que c’est ce qui peut le plus facilement l’amener à se montrer réceptive – ce qui, à mon humble avis, est faux.
J’en ai fait l’expérience à de multiples reprises : la perspective de perdre plus rapidement qu’autrui son capital auditif n’effraie que rarement le chaland.
On le dit, certains le hurlent même : “le jeune est con”. Il vit dans l’instant, se soucie peu de l’avenir. Une telle campagne vise à le faire réfléchir. Mais ce qu’on lui présente, c’est une perspective lointaine… et qui semble finalement assez naturelle, suivant l’idée que perdre son audition avec l’âge est tout à fait normal. Et que la perdre un peu plus vite que son ascète de voisin n’est pas un drame. Car au moins, le jeune aura vu, vécu, senti, vibré… et ne regrettera rien ! “Come on Die Young“, comme le dégueulent ces crétins écossais / écossés du groupe Mogwai, tout en arrachant par milliers des cellules cillées chaque soir de concert.
Notons de plus une certaine culpabilisation, par l’utilisation du terme “écouter”, qui implique une attitude active, un choix, de la part de l’individu. Or, personnellement, je n’ai jamais “écouté” de la musique – pardon, de la “musique” – en discothèque : je l’ai entendue, j’ai subi cette purée. J’ai eu la chance de passer entre les gouttes – et Dieu sait que des gouttes de purée, c’est gras et collant. Peut-être tout simplement parce que les gouttes étaient rares, ma fréquentation de ce genre d’endroits ayant toujours relevé de l’exceptionnel.
Lorsque j’ai subi mon traumatisme auditif, en revanche, j’étais en situation d’écoute : mélomane, je m’étais rendu dans une salle de concert justement dans le but d’écouter, de vivre la musique que me proposait Stephen Malkmus, l’ex-leader de Pavement, un de mes groupes cultes. Sans doute le seul que je conserverais si un mauvais génie me sifflait l’idée saugrenue de “nettoyer la terre de tout musicien sauf un ; choisis le bien Laurent, car lui seul sera sauf” ! Mais je n’ai jamais culpabilisé, malgré certaines remarques assassines durant mes premiers mois en Enfer : je ne savais pas, je n’ai donc pas choisi de prendre un risque.
On peut regretter également une création… dans le même ton. Timide. Frileuse. Sans véritable idée, sans réel parti-pris créatif, sans aspérité, comme on dit dans le métier. On ne peut s’empêcher de penser qu’il s’agit bien là d’une campagne d’un pouvoir public… avec ce goût traditionnellement amer d’inachevé en arrière-bouche. Il est probable que les créatifs qui ont travaillé sur cette campagne, Concepteurs-Rédacteurs, Directeurs Artistiques et autres Chefs de projet, auraient voulu prendre des risques. Demain j’irai fouiller leurs poubelles pour voir si je ne trouve pas un trésor 😉
Alors quoi ? Cette campagne est-elle minable ?
Pis, est-elle regrettable (suivant l’idée qu’elle ferait plus de mal que de bien) ?
Certes non.
Il me semble que la mise en avant des acouphènes pourrait se montrer bien plus convaincante pour atteindre le but recherché par l’INPES [le site n’existe plus]. D’autant qu’il est relativement aisé de les mettre en scène – tout du moins pour ce qui est des formats audio et vidéo (TV, radio, web…).
Si ce n’est déjà fait, je vous encourage à jeter oeil et oreille sur les liens suivants : tout d’abord, un très beau dispositif dont j’ai parlé récemment : la “Testing Station”, qui permet au passant de constater qu’il écoute son baladeur mp3 trop fort.
Ensuite, vous pouvez entonner un la la la lala lalalalalala la la lala lala la la la la (quelques bons spots dont j’ai parlé sur Oreille malade) :
- Acouphènes – toute la nuit je pense, j’angoisse, c’est comme une spirale
- Troubles musculo-squelettiques (TMS) – un acouphène au poignet
- Les acouphènes existent – tinnitus is REAL
- Maya l’abeille est une salope
- Les acouphènes partout, tout le temps
- mp3 – à consommer avec modération
- Acouphènes, les plus horribles sont qui soient
- Traumatisme auditif – un beau matin dans une vie ordinaire
- Acouphène, le son qui gâche la forêt
- Acouphènes portatifs
- Acouphènes, enfin la vérité !
- Bruits intérieurs – Les sons trop forts sont dangereux
- Acouphènes, l’épidémie du siècle
Et là, il faut bien le dire, ce n’est plus www.ecoute-ton-oreille.com qu’il faudrait utiliser mais bien www.entends-tes-oreilles-siffler-sur-la-colinne-et-sache-que-ce-n’est-pas-pres-de-sarreter.fr ! Sans même parler d’hyperacousie, mal absolument inconnu du grand public : voir par exemple “vivez l’enfer du bruit”, “quand les rires deviennent une agression”, “hyperacousique, alias hyperacousik man” ou encore le trailer de Sounds Like, de Brad Anderson, dans la série Masters of Horror.
Mais tout n’est pas négatif…
Tout d’abord, je ne juge pas là les spots radio ni le site internet, et pour cause. Je doute cependant qu’ils contredisent les points sus-cités.
Ensuite, on peut reconnaître à cette création une grande clarté. Ce qui est bien souvent une marque de fabrique de l’agence DDB Paris, qui a conçu cette campagne – lecteurs publivores, vous savez sans doute que c’est l’agence qui pond régulièrement de véritables perles sur Volkswagen. Or, comme dans bien des domaines, le plus difficile en publicité est de se concentrer sur un message, afin de ne pas diluer les propos en voulant trop en dire. De ce point de vue, c’est plutôt réussi.
Enfin, surtout, on peut se réjouir qu’une campagne d’une certaine envergure naisse dans notre beau pays. Enfin, disais-je, enfin !
Car c’est bien là le plus compliqué dans l’histoire : porter à la connaissance du public un danger qui reste, pour une large part, totalement inconnu à ce jour.
Espérons que la frilosité à laquelle je fais allusion plus haut n’empêchera pas… une “certaine prise de conscience”.
Et vous, lecteurs chéris, que pensez-vous de cette campagne ?
c super qu’on sy interesse un peu, depuis le temps que ca existe, faudrait opter pour une mentalité medicale a la chinoise, prevenir au lieu de guerir (cqfd evidemment ca ne fait pas l’affaire du notre ami le medecin) ici c quand on se rend compte qu’il faut en guerir beaucoup qu’on previens ce qui reste mdr.
et je suis sur qu’on va avoir plein de surprise dans les année a venir.
100% d’accord, ce n’est pas mon métier, mais en voyant le slogan, je me suis effectivement dit c’est pas terrible, mou du genou, pas réaliste…
A te lire, je trouve ton analyse très juste, ce genre de campagne peut faire + de mal que de bien.
Je ne pense pas que ceux qui l’ont conçue aient une traitre idée de ce que sont les acouphènes ou l’hyperacousie.
ben j’ai tout dit là : [lien supprimé car le blog n’existe plus] puisque les coms marchaient pas l’autre jour.