Michel tremblait

homme qui tremble

Simon sortit du cabinet du docteur sans même s’en rendre compte, sonné, le coeur aux talons, les larmes aux yeux. Ce qu’il venait d’apprendre lui sciait les jambes.
Il essayait d’imaginer ce que serait le reste de sa vie avec ce parasite dans l’oreille et il en tremblait. Evidemment, le docteur l’avait prévenu, c’était normal, en ce moment il entendait le sifflement encore plus fort, il était plus aigu et plus présent que jamais, rien d’autre n’existait plus que ce sifflement de bouilloire qui n’allait peut-être plus jamais s’en aller, parce que c’était nouveau !
Le docteur Harbour avait choisi ses mots, avait fait preuve d’une grande délicatesse et d’une diplomatie exemplaire, mais l’effet de ses paroles avait quand même était dévastateur : si c’était vraiment un acouphène, il était tout probable que ça ne partirait pas, il faudrait que Simon apprenne à vivre avec.
Le cerveau étant la machine merveilleuse que l’on sait, il choisira avec le temps de ne plus entendre l’acouphène et, effectivement, à la longue, vous ne l’entendrez que lorsque vous y penserez… Je ne voulais pas vous parler de ça tout de suite parce qu’il est trop tôt et qu’on ne sait pas encore ce que vous avez, mais vous avez insisté…”
Il ouvrit la porte de sa voiture, s’installa au volant, sans sortir la clef de sa poche. Il déplaça un peu le rétroviseur, se regarda.
Un autre homme. Vieilli tout d’un coup, mais pas par la fatigue. Le film était bien loin. Le film n’existait plus. Il posa sa main sur son oreille gauche et éclata en sanglots. De gros bouillons lui montaient à la gorge et crevaient dans sa bouche en sons inarticulés qui auraient sûrement été des blasphèmes s’il avait été capable de les articuler.
Jamais il n’apprendrait à vivre avec ça ! Jamais !

Michel Tremblay, L’homme qui entendait siffler une bouilloire

Articles liés

Anxiété généralisée et stress chronique

Cela va faire bientôt dix ans que ma vie a basculé. Anxiété généralisée et stress chronique sont entrés dans ma vie un matin, sans prévenir et sans s’essuyer les pieds. Ils les ont posé sur la table, chez moi qui était d’un naturel serein. J’ai compris tout de suite, à l’époque, qu’ils comptaient s’installer un moment. Il a fallu que je pose un auto-diagnostic pour, enfin, voir un peu plus clair dans leur jeu.

Réponses