La Chevauchée des Valkyries

Richard Wagner

Wang percevait la respiration de son correspondant, encore plus précipitée que la sienne. Il avait la désagréable impression d’être habité et ralenti par un parasite. Un sifflement proche lui contracta les muscles du dos et de la nuque.
“Comment as-tu pu te fourrer dans ce guêpier ? vitupéra Frédric. Une règle de base de la stratégie est de ne jamais se laisser surprendre en infériorité numérique sur un terrain plat. Où est passé ton fameux instinct de survie ?”

Cette dernière phrase déclencha, au-delà d’un agacement légitime, un éclair de lucidité dans l’esprit de Wang. Il prit conscience que son attitude allait à l’encontre des préceptes de grand-maman Li, qu’en réagissant par la peur à la soudaineté de l’offensive anglaise, il avait renoncé à influer sur le cours de sa vie.
Un réflexe l’entraîna à lever la tête et il aperçut, comme deux nuages scintillants, les P.C. des stratèges qui flottaient silencieusement deux cents mètres au-dessus du sol. Le défendeur français et le challengeur néerlandais s’étaient spontanément rejoints au-dessus du veld, conscients que la guerre risquait de se jouer sur cette première charge, sur ce dévoilement subit des intentions de Frankij Moelder.
Tout en courant, Wang s’efforça de chasser ses pensées, de faire le vide en lui. Les cavaliers comblaient rapidement la distance qui les séparait des fuyards. Leurs tirs s’intensifiaient, se mêlaient aux hurlements des mourants et aux roulements de sabots pour composer un fond sonore assourdissant.

Pierre Bordage, Wang, 2 – Les aigles d’Orient

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